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Orbe d’or du temps
Étoile des premiers temps, étoile des prophètes et des miracles,
désagrège-toi dans le poème, abîme-toi dans les ténèbres les plus noires.
Elle perdure dans le sang, cette folle clarté,
cette flamme invisible qui n’a nom ni signe.
Fantôme d’étoile, étoile d’angoisse froide,
disparais avec les Parques et fuis avec les mythes.
Sous cet arbre dont l’écorce est incrustée de siècles de paroles,
un feu d’enfer s’allume et des racines affamées flambent.
Qui es-tu, corps balafré, lourd de la poussière des âges,
d’un temps sans retour, jadis évanoui,
qui, à la place d’un visage désespéré et défait,
arbore une loi cruelle, pour toi et ta tribu ?
Prisonnier de ta parole, de ses nœuds inextricables,
annonce-toi dans le silence qui tonne, exprime-toi par ton regard muet,
et comme un guerrier inutile aux yeux noirs de terre,
tourne-toi vers l’orbe d’or et, triomphal, disparaît.
Étoile des premiers temps, étoile des prophètes et des miracles,
désagrège-toi dans le poème, abîme-toi dans les profondeurs de la parole,
autant que perdure dans le sang cette folle clarté,
ce feu souterrain, inextinguible.
Aco Šopov, Cinérémancien (Гледач во пепелта), 1970
Traduit par Edouard J. Maunick, Anthologie personnelle, 1994
L’original macédonien de ce poème a été initialement publié dans la revue Sovremenost, XV, 6, 1965.