Et le sursaut soudain

Et le sursaut soudain, sous le bruit frais sous le coup de poignard.
J’erre tournant, possédé comme les phalènes, autour de la lampe tempête
Me brûlant les ailes de l’âme au chant sirène de tes lettres.
Et me voici déchiré calciné, entre la peur de la mort et l’épouvante de vivre.
Mais aucun livre aucun qui arrose mon angoisse.
L’esprit est bien plus désert que le Sahara.

Or voici les cendres amères de mon cœur, comme une fleur séchée.
Toi seule peux me sauver mon espoir, et ta présence
Toi mon présent, mon indicatif mon impératif
Toi ma parfaite, non tes lettres, tes lèvres soleil de l’éternel été.

Et je t’attends dans l’attente, pour ressusciter la mort.

Léopold Sédar Senghor, Lettres d’hivernage, 1973